1 + 1 = 3 … ou le casse-tête des jeunes parents

Etre deux, être amoureux, être disponible l’un à l’autre et puis soudain, être trois, avoir un bébé, devenir parents, devenir une famille. L’équation a changé. Il faut intégrer des variables, résoudre des inconnues. Un défi passionnant mais souvent délicat pour le couple.

Ils l’ont rêvé, attendu, désiré… Bébé est enfin là, tout en tendresse. Si petit et vulnérable, si dépendant, ses besoins sont immenses. Dans son regard pastel, le reflet de ceux qu’il a fait parents, à la fois émerveillés et sous le choc d’avoir donné la vie. Ils se contemplent comme père et mère, alors qu’hier ils étaient deux amants. Chaque jour leur apporte de nouvelles expériences et peu de répit. Pour répondre aux besoins quotidiens de leur nourrisson, ils se mobilisent et s’appliquent. Parfois ils se relaient aux soins et aux biberons, pour permettre à l’autre de récupérer. La solidarité prend le pas sur la séduction. La résolution des contraintes, sur la spontanéité. La complicité comme le désir de l’un pour l’autre ont parfois du mal à retrouver leur chemin et le bon moment pour s’exprimer. Les pleurs du petit d’homme ou la fatigue font obstacle aux moments à deux. La relation du couple est en train de changer.

Aussi désirée soit-elle, une naissance –qui plus est, la première – implique une période de crise pour les couples, au sens d’une phase de transformation de la relation, jalonnée d’émotions. L’équilibre du couple change d’état. Or le passage d’un état à un autre peut s’avérer plus ou moins inconfortable et conflictuel. Après le baby-blues, le baby-clash… ! Osons le dire, tout n’est pas rose quand l’enfant paraît : il s’agit d’une période risquée pour la relation, aboutissant à une séparation dans un couple sur cinq, d’après le psychiatre Bernard Geberowicz. Selon lui, même si, dans la plupart des cas, l’arrivée du premier enfant permet de « vérifier la solidarité, les connivences, les valeurs et affinités d’un couple », elle peut aussi révéler « des différences trop profondes à combler ».

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Pour aller plus loin : Le couple face à l’arrivée de l’enfant : Surmonter le baby-clash, Bernard Geberowicz, Colette Barroux-Chabanol, Éd. Albin Michel, 2014, 263 p., 17 €.

S’il ne perçoit pas ce changement dans sa dynamique relationnelle, le couple se laisse entraîner hors de ses repères sans comprendre ce qui lui arrive. « Depuis l’arrivée de Téo, je n’ai plus une minute à moi et j’ai l’impression que, pendant ce temps, son papa en fait de moins en moins », s’inquiète une jeune maman. « Tu n’as plus d’yeux que pour lui ! » se défend son conjoint. Les tentatives d’échanger se transforment en disputes, les malentendus s’installent, les partenaires se sentent délaissés, incompris, dévastés ; l’épuisement vient recouvrir les frustrations de toutes sortes. Chacun vit des changements au cœur de lui-même qui, associés aux nouvelles interactions dans sa vie, vont également faire bouger sa façon d’être en relation avec le monde extérieur. C’est une révolution.

« Rien ne sera plus comme avant, et tant mieux ! »

A titre personnel tout d’abord : devenir père ou mère s’accompagne de mouvements profonds dans l’être qui interrogent les nouvelles responsabilités par exemple mais aussi bouleversent l’affectivité, les émotions, les liens d’attachement… Outre des élans joyeux ou attendris, l’arrivée d’un bébé peut générer des peurs, des inquiétudes, réveiller des colères ou des chagrins enfouis. « Au début, dit Emmanuelle, c’était dur de sentir mon fils complètement dépendant de moi. Ça m’angoissait. Puis quand j’ai repris mon travail, bizarrement, j’ai eu beaucoup de mal à me séparer de lui. Je pleurais tous les matins après l’avoir déposé à la crèche. Ça  a duré des semaines  ». Chaque individu chemine à son rythme et selon son histoire à travers ces bouleversements intimes. Pour la maman, les neuf mois de la grossesse, l’accouchement ou encore l’allaitement sont vécus dans le corps et il lui faut un peu de temps pour intégrer ces événements, se retrouver, s’accepter, se sentir à nouveau femme. Quant au papa, que ressent-il face à ces métamorphoses spectaculaires et aux attentes dont il est l’objet ? Et qu’est-ce que l’apparition de son enfant lui fait vivre ? Ou quand sa compagne est accaparée par le bébé et semble le négliger ? Le dialogue n’a pas forcément lieu dans le couple, sur toutes ces perceptions nouvelles de soi. Nul doute, pourtant, qu’elles impactent la relation conjugale.

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Parallèlement, le couple fait face à des mouvements importants dans sa relation. Il doit construire une nouvelle organisation commune des places, des tâches ou des rôles, qui le force à se déplacer et se repositionner. Son intimité est bouleversée ainsi que sa libido. Ses nuits sont morcelées. La fatigue ou les contraintes balaient tous les petits moments à deux. Le bébé passe avant tout. Le couple parental se forme, le couple conjugal s’oublie un peu. Ça non plus n’est pas forcément mis en mots. Enfin, les relations se modifient avec la famille, les amis (et plus généralement le monde extérieur), à qui le couple a moins de temps à consacrer ou qui cherchent leur place eux-mêmes dans la nouvelle composition couple-bébé avec plus ou moins d’adresse et de bienveillance.

L’idéal selon Bernard Geberowicz : « Que chacun soit prêt à considérer que rien ne sera plus comme avant, et tant mieux ! ». Les parents font l’expérience de l’élasticité de la relation. Celle-ci n’est pas figée, ni rigide ; elle peut s’adapter aux nouveaux besoins, aux nouvelles données, et s’enrichir du fait même de se transformer. Mais quand le bouleversement est trop déstabilisant, quand la révolution charrie trop de déceptions, de malentendus ou d’incompréhensions, quand les soubresauts de leur relation mettent les partenaires en insécurité, il arrive que l’un ou l’autre se replie, s’isole, voire montre des signes de dépression. L’entourage amical ou familial peut être sollicité pour trouver des appuis ou bien un tiers qui saura écouter cette souffrance et les affres de la nouvelle configuration familiale.

Des moments privilégiés

Les tensions, les incompréhensions s’apaiseront le plus souvent dans le dialogue du couple, dans le soutien et la solidarité que celui-ci pourra se manifester mutuellement, dans le partage des émotions et des vécus de chacun, mais aussi dans la construction volontaire et déterminée de temps à deux, sans enfant : des temps de détente et de plaisir, des temps de retrouvailles, de tendresse ou de sensualité, des temps pour s’aimer… Ou encore, entre amis, car les relations extérieures sont aussi sources de partage, de distraction et de décontraction. Accepter les mutations relationnelles, les bouleversements personnels, la nouvelle dimension du couple, ne signifie pas renoncer à son couple d’origine, ce couple d’amants qui est la source du projet. Afin de ne pas se perdre de vue, de rester en lien malgré tous les bouleversements qui pourraient le placer dans un mouvement centrifuge, le couple peut choisir de créer des moments privilégiés. Emilie et Pierre ont instauré par exemple de déjeuner ensemble tous les jeudis et ils tiennent la place, parfois de haute lutte, en résistant aux pressions professionnelles et aux contraintes diverses. Leur résolution est de privilégier « le plaisir d’être ensemble » et le fait de « parler d’eux ». Emma et Phil se consacrent quant à eux un moment d’échange tous les soirs quand leurs jumeaux dorment pour « prendre le temps de se retrouver et de se séduire » malgré leur épuisement. Soirées cinéma ou canapé, nichés dans les bras l’un de l’autre, weekends sans enfants, diner au restaurant ou sur un coin de table de cuisine, peu importe ! Ce qui compte c’est que le couple fasse des choix qui lui permettent de vivre sa conjugalité et se préoccupe de lui-même : toute façon de nourrir le précieux lien sans lequel, après tout, bébé n’aurait pas pu montrer le bout de son nez…

Anne de la Brunière – article publié dans le magazine Com’ sur un plateau n°9 – Septembre 2018

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